QUELS RÔLES POUR LES
POUVOIRS PUBLICS ? Léonard de Vinci clamait que l’art était « una cosa mentale », quelques artistes ont exploité à fond cette idée en considérant que l’art pouvait n’être qu’un concept, que l’essentiel en demeurait l’entendement. Fort logiquement, l’explication de la démarche et les mots ont pris le pas sur l’oeuvre, dont la réalisation matérielle ne s’avère même plus nécessaire. Aucun
écrivain, aucun poète, n’envisagerait sérieusement de remettre en cause les
caractères de l’alphabet, au risque évident de vider de tout sens son écrit et
de perdre ainsi son moyen de communiquer. Pourtant, dans le domaine des arts
plastiques, après Dada et sa volonté de désacraliser l’oeuvre, des voies
radicales ont sans doute atteint ce point contraire à la raison. Alors,
après avoir étudié les intentions qui régissent l’avant-garde, à travers son
propre réseau de reconnaissance et d’intérêt, il paraît judicieux
d’approfondir, exemples à l’appui, le fonctionnement et le rôle des lieux
publics qui constituent les pièces maîtresses du système en France. En littérature, même s'il reste préférable d'appartenir à certaines professions, il semble au moins que l’État n’intervienne pas dans le choix des oeuvres à éditer, à chacun de trouver sa place sur le marché, son éditeur, au risque de finir au pilon. Pour les Arts Plastiques, il n’en va pas ainsi. Le Ministère de la Culture, par la filière de ses conseillers (1) oriente les tendances sans soucis du marché, en encourageant notamment les manifestations « d’avant-garde » ou considérées comme telles, au détriment bien entendu de la peinture, surtout quand elle devient figurative. Cet état de fait révèle une attitude peu tolérante et injuste puisque la figuration revêt parfois aussi d’autres formes que les traditionnels « chromos » ou aquarelles à caractère populaire. Elle peut même, pourquoi pas, porter un concept. Le débat n’est certes pas nouveau, l’académisme a un temps occulté l’impressionnisme naissant, mais le problème sur la question centrale de la pensée officielle, sorte de pensée unique en matière de création, existe bien toujours et l’histoire se répète. Les commissaires d’expositions dites « contemporaines » continueront sûrement encore à rejeter, sans même les connaître, les formes d’art n’entrant pas dans le cadre de leur modernité. Dès
lors, le plus simple et finalement le plus équitable serait sans doute pour les
pouvoirs publics d’intervenir le moins possible dans le domaine des Arts.
1) Le Conseiller pour les Arts Plastiques est un agent du Ministère de la Culture. Placé sous l'autorité du Directeur Régional des Affaires Culturelles, il met en oeuvre la politique de l’État dans le domaine des Arts. En liaison avec la Délégation aux Arts Plastiques, il instruit les demandes de subventions, suit l'activité des Centres d'Art, des FRAC, et assure la promotion de ces structures. Les dossiers relatifs à l'enseignement des Arts et aux opérations de commandes publiques dépendent aussi de sa compétence. 2) La gestion du FRAC de Bourgogne a été
examinée pour la période 1989-1993 par la Chambre Régionale des Comptes.
Celle-ci révèle notamment des incompréhensions, des méfiances et des
incertitudes réciproques chez ses membres. Une comptabilité imparfaitement
tenue ainsi qu'une diffusion très confidentielle des oeuvres acquises. La
Chambre va même jusqu'à s'interroger sur l'avenir du FRAC (Traces écrites -
Mars 1995). |
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